La passion
Hier après-midi, à la sortie de la station de métro Louise, un couple d’une vingtaine d’années escaladait les marches quatre à quatre en se disputant violemment. « Vas-y, mais vas-y va voir ailleurs! » « mais c’était rien qu’un petit regard!« , se hurlaient-ils en se bousculant l’un l’autre sous les regards mi-amusés/ mi-attérés du public des heures de pointe. Un instant j’ai cru à un jeu de rôle, une pièce de théâtre en plein air, tant j’étais surprise d’assister à un tel esclandre dans la sphère publique. Aux larmes qui ont suivi, j’ai compris que la scène était bien réelle. Sans le vouloir, j’ai assisté et à la suite de l’histoire et au dénouement tant c’est allé très vite : la seconde d’après, ils s’enlaçaient, riaient comme des fous et se dévoraient des yeux et des lèvres. En les regardant, j’ai vu défiler à vitesse démesurée les pages d’un roman d’Alexandre Jardin; j’ai entendu leurs petits coeurs tambouriner, leurs appréhensions faire trembler le sol sous leurs pieds, leurs peaux se vêtir de frissons (ce bruit là est presque imperceptible, il ressemble à celui de l’herbe qui boit, après la pluie) et leur quotidien se déshabiller de toute rationalité. J’ai eu peur pour eux, sans doute, pour les chutes vertigineuses; mais j’ai envié très fort cette hauteur qu’ils doivent atteindre tous les deux, à la mesure d’un ciel irréel dessiné par leurs soins.
Jean Francis , le 18 avril, 2013 à 22 h 36 min a écrit:
Oh comme je le comprends, ce besoin de passion.